Dans son allocution du 8 janvier, alors que la situation n’était pas encore sous contrôle, le Président Lula a souligné que jamais des militants des partis de gauche ou des indigènes n’avaient contesté les résultats des élections et fait usage de violence dans le cadre d’un processus démocratique. Il a aussi rappelé que la violente politique de Bolsonaro a favorisé la prospection illégale d’or et l’abattage de bois dans la forêt amazonienne et que les défenseurs de ces actions étaient parmi les putschistes à Brasilia.
Préserver la démocratie et la constitution
“Nous ne laisserons pas la démocratie nous échapper !” C’est la promesse faite par le président brésilien à l’issue de la réunion d’urgence organisée avec les gouverneurs des 27 États de la fédération brésilienne, les dirigeants du tribunal suprême fédéral et du congrès national. Dès le décret signé pour placer la ville sous protection fédérale, le président Lula a lancé les recherches pour identifier et arrêter les coupables. De nombreux mandats d’arrêt ont été émis et des perquisitions effectuées visant les dirigeants soupçonnés d’avoir des responsabilités dans la tentative du putsch. Des enquêtes sont en cours pour identifier les sources de financement des manifestations mais d’ores et déjà l’agronégoce du soja, premier destructeur de la forêt amazonienne, est pointé du doigt.
Des processus démocratiques toujours en marche : le travail continue
Sônia Guajajara, nouvelle ministre des peuples indigènes, a dénoncé l’attitude laxiste des forces de l’ordre envers les putschistes. Elle a rappelé que les réunions pacifiques des peuples indigènes qui se déroulent chaque année sur l’esplanade des Ministères ont été, elles, réprimées de façon disproportionnée par la police militaire. Dans les jours qui ont suivi l’attaque, elle a poursuivi son travail avec les organisations autochtones en rencontrant, entre autres, les peuples de Bahia et ceux de l’État du Pará.
C’est le mercredi 11 janvier qu’a eu lieu la cérémonie d’investiture de Sônia Guajajara et de Anielle Franco en tant que ministre de l’égalité raciale. Cette cérémonie très émouvante s’est déroulée en présence du président Lula et du très important chef indigène du peuple Yanomami : le chef Davi Kopenawa. Lors de son discours, Sônia Guajajara a vigoureusement condamné une fois encore la tentative de coup d’État et fait scander par la salle : “amnistie jamais !” Elle a aussi présenté les membres de son ministère, tous indigènes, et annoncé que la Fondation Nationale de l’Indien (FUNAI) sera désormais placée sous l’autorité de son ministère et non plus sous celle du ministère de la justice.
La cérémonie d’investiture du 11 janvier de Sônia Guajajara et Anielle Franco
Une situation politique qui reste fragile
Le gouvernement brésilien reste en état d’alerte même si la sécurité a été renforcée. Le contrôle de la police militaire, qui a fait preuve de passivité voire de connivence avec les casseurs, est un défi considérable pour le futur de la démocratie brésilienne. Mais ce contrôle est difficile : l’idéologie bolsonariste a contaminé les forces de police qui obéissent directement aux ordres des gouverneurs, et non du gouvernement fédéral. Et quatorze des vingt-sept gouverneurs du pays sont, ou ont été, des alliés de Jair Bolsonaro…
De plus, la coalition de Lula ne disposant que d’une faible majorité au Congrès, ses marges de manœuvres sont étroites : une hostilité du congrès risque d’être un barrage permanent à sa politique, que ce soit pour mieux encadrer la police ou défendre la cause et les territoires indigènes.
Des mots d’ordre appelant à poursuivre les actions contre le gouvernement de Lula circulent toujours sur les réseaux sociaux. Jair Bolsonaro, lui-même, a publié un tweet pour soutenir ses partisans et une vidéo contestant une nouvelle fois la victoire de Lula aux élections présidentielles (celle-ci a été retirée deux heure plus tard). Bien qu’une enquête ait été lancée pour évaluer ses responsabilités dans l’assaut du 8 janvier, il continue de mettre de l’huile sur le feu et les choses sont loin d’être apaisées : les jours et les semaines à venir seront déterminants.
Sources :
Le Monde : “Au Brésil, le gouvernement est en état d’alerte, la sécurité a été renforcée à Brasilia”
Huffington Post : “Brésil : Lula condamne l’invasion des « vandales fascistes » à Brasília”
Courrier international : “Les enquêtes sur l’assaut du parlement brésilien rattrapent Bolsonaro”
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Article écrit par Laetitia Forestier pour Planète Amazone