Dans la matinée du vendredi 18 août, le cacique Valdir Martins du peuple guarani-kaiowá a été arrêté par la police civile et militaire pour homicide involontaire. Il traversait alors la ville de Juti, dans l’État du Mato Grosso do Sul, pour collecter des feuilles de manioc.
Une arrestation pour des motifs politiques
Selon les informations transmises à Planète Amazone par la communauté, l’arrestation du cacique relève d’une confusion juridique grotesque. Son mandat d’arrêt évoque un certain « Valdir Martins de Souza Gomes », alors que le cacique Valdir ne porte pas le nom de « Souza Gomes ». En plus de la confusion sur les noms de famille, les deux Valdir n’ont pas les mêmes dates de naissances.
À ce stade, on pourrait croire à une simple erreur judiciaire. Cependant, le timing est troublant : l’arrestation du cacique survient en même temps que la visite technique de l’organisme gouvernemental FUNAI pour la démarcation de sa terre. Cette « erreur » est un moyen bien pratique d’écarter un ardent défenseur des droits des Guarani-Kaiowás et de perturber le processus de démarcation, garanti par la Constitution de 1988.
Un leader très engagé pour la protection de sa terre
Le cacique Valdir est activement engagé pour la défense des terres traditionnelles de son peuple et il s’oppose donc frontalement aux propriétaires terriens, qui s’approprient les lieux sacrés des Guarani-Kaiowás, notamment pour y construire des habitations ou en faire des terres agricoles. Ces fermiers sans scrupules n’hésite pas à incendier les villages et campements des Guarani-Kaiowás et à les attaquer directement avec des armes à feu.
Mais, les Guarani-Kaiowás et leur chef, le cacique Valdir, ne se laissent pas faire. Ils se battent avec ardeur et courage pour la reconquête de leur territoire. En juillet 2022, ils ont mené l’opération reprise (“retomada”) de Curupi : des dizaines d’indigènes ont occupé le latifundium (une immense propriété non utilisée) où ils résident maintenant et ont résisté à la tentative d’expulsion immédiate par la police militaire avec des arcs, des flèches et des barricades.
Dans une vidéo dénonçant l’arrestation de son fils, la matriarche du clan Nhandy, Verônica Veron, explique les violences que subissent les Guarani-Kaiowás et dénonce les actions des propriétaires terriens :
“ Les propriétaires terriens nous poursuivent jour et nuit pour nous exterminer, ils ont même essayé de nous enterrer vivants avec une ordonnance du tribunal, et ils ont échoué, et maintenant je viens demander du soutien, car demain ce sera peut-être mon tour d’être arrêtée et tuée. ”
Le peuple indigène le plus menacé au Brésil
Les Guarani-Kaiowás subissent de nombreuses attaques des milices des propriétaires terriens, voire même de la police. Ces attaques déplacent, blessent et tuent de nombreux indigènes tous les mois en toute impunité !
Par ailleurs, les activités économiques réalisées illégalement sur les terres indigènes menacent directement la survie de ce peuple. Par exemple, les pesticides utilisés par l’agriculture intensive polluent les cours d’eau et empoisonnent la faune locale, privant les Guarani-Kaiowás de leurs moyens naturels de subsistance.
« Que l’étoile de l’espoir brille pour les Guarani-Kaiowás. Si elle ne brille pas, nous marcherons… »
Pour sauver les Guarani-Kaiowás de l’extermination, il faut démarquer très rapidement leurs terres. À ce sujet, en décembre 2022, la grande Assemblée, organisée par le conseil Aty Guaçu du peuple Guarani-Kaiowá et dont nous sommes partenaire cette année, rappelle que c’est le président Lula, lors de son premier mandat, qui a déclenché la dernière démarcation en date d’un territoire des Kaiowas. “Mais depuis lors, rien n’a avancé, seules la violence et la faim ont envahi nos territoires en attente de démarcation.”
“La démarcation de nos terres n’est pas un choix de Lula, mais une obligation, écrite et inscrite dans la loi la plus sacrée pour un dirigeant, la Constitution fédérale. Et Lula, en tant que Gouverneur du Peuple, doit honorer cet engagement de l’État et garantir notre droit sacré.”
Au-delà de la démarcation, il faut également prendre des mesures drastiques pour faire face à la crise humanitaire que connaît le peuple Guarani-Kaiowá. Sur le plan sanitaire, ils ont besoin de médecins, de l’assainissement des cours d’eau et d’une diminution drastique de l’usage des pesticides…
En somme, pour sauver les Guarani-Kaiowás et leur environnement, les responsables étatiques, fédéraux et judiciaires brésiliens doivent enfin réaliser des changements structurels au Mato Grosso do Sul. Dans un territoire qui repose économiquement surtout sur l’agriculture intensive, l’élevage et l’extraction minière, il est urgent de développer de nouvelles activités plus durables comme l’agroécologie. Il en va de la survie du peuple Guarani-Kaiowá…
Sources :
A Nova Democracia : MS: Cacique Guarani-Kaiowá sofre prisão política em meio a luta contra latifúndio
Liberdade Ao Kasike Valdir : compte rendu de l’Assemblée des Guarani-Kaiowás du 18 août 2023
Compte rendu de l’Assemblée des Guarani-Kaiowás de décembre 2022
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Article rédigé par Quentin Moreau pour Planète Amazone