La COP27 s’est déroulée du 6 au 20 Novembre derniers à Charm-El-Cheikh (Egypte). Un sommet particulièrement scruté après les événements climatiques de l’été. Notre délégation de représentants indigènes, invités par Planète Amazone sous la bannière de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, a participé à un nombre important d’événements.
Les représentants de la délégation Planète Amazone / Alliance des Gardiens
Mindahi Bastida : gardien du peuple Otomi
Membre fondateur de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, mouvement lancé lors de la COP21 à l’appel du cacique Raoni, Mindahi Batisda Munoz s’illustre depuis des années pour son combat en faveur de l’environnement et du respect des droits et de la culture des populations indigènes. Originaire du peuple Otomi, aujourd’hui établi au nord de Mexico, il a participé à de nombreux sommets internationaux, dont l’emblématique Sommet de la Terre de 1992 à Rio de Janeiro.
Il est aujourd’hui Directeur de l’Original Nations Program de l’organisation The Fountain aux Etats-Unis et membre du Conseil Régional Otomi-Toltec de Mexico. Il est par ailleurs réputé pour ses écrits sur les relations entre l’Etat et les peuples indigènes, l’éducation interculturelle ou encore la propriété intellectuelle des savoirs traditionnels.
Aux côtés de Gert-Peter Bruch, il fustige depuis des années les effets pervers des crédits carbones, ces compensations financières dénoncées par l’alliance comme des “fausses solutions”, qui permettent aux entreprises de continuer leurs pratiques polluantes en toute légalité.
Grandmother Helen : une gardienne chamane
De son vrai nom Helen Lindkmark, elle est née dans le village de Liikavaara, situé dans le sud de la Suède. Après avoir grandi coupée de ses origines, c’est à l’adolescence qu’elle entreprend un retour aux sources. Elle se reconnecte aux savoirs chamaniques de son peuple d’origine, les Samis, connus en Occident sous la dénomination exogène de “Lapons“. Les Samis sont le dernier peuple autochtone d’Europe.
Défendant son héritage culturel et la profonde connexion avec la nature de son peuple, elle a livré, lors de la précédente édition de la COP à Glasgow, le témoignage poignant de la destruction de son village par une compagnie minière, et élève la voix contre ces pratiques dévastatrices pour l’environnement et les populations autochtones de Suède.
Appolinaire Oussou Lio : défenseur des forêts sacrées
Chef traditionnel du peuple Tolinou au Bénin et membre du Comité Exécutif de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature, il est également Fondateur du Groupe de Recherche et d’Action pour le Bien-être (GRABE) et Secrétaire Général de la Mairie de la ville d’Avrankou au Bénin. Appolinaire est à l’origine un géographe-naturaliste qui, depuis 1996, promeut dans son pays et dans le monde une relation homme-nature respectueuse.
Son travail sur le Green Belt Movement et son étude de la transmission intergénérationnelle en Afrique du Sud, sont à l’origine de la création du GRABE. A travers ce dernier, il œuvre pour une conservation des ressources naturelles basée sur les savoirs ancestraux et à la diffusion des connaissances traditionnelles auprès des jeunes générations.
Avec son programme “Arbre-vie”, iI se bat à leurs côtés pour restaurer et protéger les forêts sacrées. Expert en jurisprudence de la Terre, il milite pour que leur soit accordé le statut d’aires protégées.
Moment fort aux côtés de Stop Ecocide et la République des Vanuatu
Pendant les 10 premiers jours de la COP27, la délégation Planète Amazone / Alliance des Gardiens de Mère Nature a participé à un nombre important d’événements et de réunions officielles ou informelles. Après le départ de Mindahi, Appolinaire et Grandmother Helen, le cacique Ninawa Huni Kui, membre de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature et partenaire de longue date de Planète Amazone a pris le relai pour nous représenter lors de notre événement officiel, co-organisé par Planète Amazone, Stop Ecocide et la représentation de la République des Vanuatu : “Curbing crisis and enabling implementation: the role of criminal law” (Trad. Juguler la crise et se mettre en ordre de marche : le rôle du droit pénal).
Gert-Peter Bruch, fondateur de Planète Amazone, n’a pas pu assister à cet événement. Mais il a transmis un message important sur la nécessité de protéger les peuples autochtones et l’Amazonie et ainsi nous protéger nous-même. Son intervention a été suivie d’une diffusion d’un extrait du film Terra Libre, fortement applaudie.
Le cacique Ninawa, a quant a lui appelé à notre responsabilité pour protéger notre planète, dont nous dépendons : “nous devons comprendre que nous faisons partie de la nature (…) C’est une question de survie pour mon peuple et pour l’humanité. En tuant la Terre, on se tue nous-même (trad. ES).”
Il a par ailleurs dénoncé la duplicité de la COP, financée par les multinationales, responsables de la destruction des écosystèmes, tout en soulignant que celle-ci permettait néanmoins d’offrir une tribune pour les peuples indigènes. “La COP ne peut être une solution, puisqu’elle entretient le système qu’elle dénonce”,
Reconnaissance de l’écocide : une solution à la fois pragmatique et urgente
Pendant notre événement officiel, Malcolm Delessa, représentant de la République de Vanuatu, a rappelé que l’écocide arrivait à temps. Abordé pour la première fois en 1972, le sujet a mis cinquante années avant d’être considéré comme un sujet sérieux. Et depuis 2019, vingt-quatre États s’en sont déjà emparés. Une nette accélération qui ne doit pas en faire oublier l’urgence. “We are out of time !” (“nous n’avons plus le temps !”) – dit-il.
“La reconnaissance du crime d’écocide est la seule véritable action climatique dont nous avons besoin, car elle met les pollueurs face à leurs actions”, a ajouté Nnimmo Bassey, cofondateur de Environmental Rights Action (ERA) et directeur de la Mother Heart Foundation.
Pour l’avocat spécialiste du climat, James Cameron, le principe d’écocide a l’avantage de pouvoir constituer un accord unique et contraignant (que l’on peut pénaliser), plutôt que d’avoir une multitude de traités inefficace. Il est aussi, d’après lui, “à même de nous reconnecter à notre appartenance aux systèmes naturels”.
Séverine de Laveley, député écologiste du parti Ecolo belge, était également présente. Son gouvernement, qui vient de voter en faveur de l’entrée de l’écocide dans son code pénal, représente un modèle à suivre. “La reconnaissance de l’Écocide est l’arme des communautés contre le profit”, nous dit-elle.
Revivre notre évènement officiel
“Curbing crisis and enabling implementation: the role of criminal law”
Participants : Patricia Kameri-Mbote, Directrice du département de droit des Nations Unies pour l’environnement (UNEP), Jojo Mehta, co-fondatrice de la fondation Stop Ecocide; James Cameron, avocat spécialisé dans le climat; Paul Polman (Imagine) ; Nnimmo Bassey (HOMEF); Dalia Marquez, juriste défenseur des droits humains, et le Chef Ninawa Huni Kui, de l’Alliance des Gardiens de Mère Nature.
Article écrit par Anne-Laure Pianca et Eléonore Di Maria pour Planète Amazone