En novembre 2023, une température record proche des 40°C a été enregistrée, et le fleuve Amazone est tombé à son niveau le plus bas depuis un siècle. Pour la première fois en 121 ans, le niveau de la rivière Rio Negro, un affluent de l’Amazone, est passé en dessous des 13 mètres de profondeur. Les différents relevés effectués dépassent les records enregistrés jusqu’ici, qui étaient déjà alarmants.
Une sécheresse aux conséquences dramatiques
Cet épisode de sécheresses est terrible pour la biodiversité locale. Au lac Téfé, près de 178 dauphins roses ont été retrouvés morts, ce qui représente environ 10% de la population de la région, selon l’association écologiste Sea Shepherd. De nombreuses espèces de dauphins déjà en danger pourraient connaître une extinction totale. Au-delà des dauphins, c’est l’ensemble des animaux aquatiques qui souffrent à l’image des milliers de poissons morts qui flottent à la surface des eaux.
Les premières victimes de ce désastre écologique sont bien entendu les populations locales, et en particulier les peuples indigènes dont la pêche, devenue presque impossible, est une source d’approvisionnement cruciale. Parallèlement, la diminution des cours d’eau complique considérablement l’approvisionnement alimentaire de nombreux villages qui dépendent traditionnellement de livraisons par voie fluviale. En effet, la quasi-totalité des villages de l’État d’Amazonas sont actuellement en état d’urgence.
La ministre brésilienne de l’environnement Marina Silva résume lors d’une interview accordée à Reuters :
“La situation est très préoccupante. Cette sécheresse record a perturbé les voies de transport fluvial, menaçant de pénuries d’eau et de nourriture, et une importante mortalité des poissons est déjà en cours”.
Quelles sont les causes de cet évènement de sécheresse dramatique ?
Pour expliquer cette catastrophe, deux phénomènes sont à l’œuvre. D’une part, le changement climatique engendré par les émissions humaines de gaz à effet de serre a provoqué un réchauffement des eaux de l’Atlantique nord. D’autre part, le phénomène météorologique El Niño provoque un réchauffement de la surface des eaux de l’océan Pacifique, lequel entraîne la formation de systèmes de basse pression dans l’atmosphère.
La déforestation massive de la région a également aggravé la situation, réduisant la capacité de la forêt à réguler le climat et à retenir l’humidité, augmentant le déclenchement de feux à des fins de défrichage et d’exploitation, ce qui a pour effet d’augmenter la température et de dégrader la qualité de l’air coincé par El Niño.
Et après ?
Cette sécheresse historique inquiète par ses répercussions colossales sur la vie des populations locales. La vie des plus de 600 000 personnes touchées, selon les estimations du Guardian, est dramatique. Les enfants ne vont plus à l’école parce qu’ils ne peuvent plus s’y rendre par voie fluviale, la pêche est devenue quasi impossible et l’eau pour se laver, cuisiner et boire commence à manquer dans certaines régions. Les experts prédisent que la situation pourrait perdurer jusqu’au début de l’année 2024.
Par ailleurs, cette situation est une bombe à retardement. En effet, la saison des pluies, qui débute d’ordinaire en décembre, sera cette année plus courte et elle risquerait donc d’être insuffisante pour recharger les sols en eau. La sécheresse actuelle risque d’être un aperçu dramatique de ce que pourrait subir la région dans un futur sans baisse des émissions de gaz à effet de serre.
Considérons cette situation tragique comme un signal d’alarme et un appel à s’unir avec la communauté scientifique et les peuples indigènes dans la lutte pour garantir à l’humanité toute entière un avenir viable.
Pour aller plus loin :
Nouveau rapport du GIEC : l’humanité au bord du précipice
Brésil : la multinationale Bunge détruit la plus vaste savane du monde
Sources :
Reuters : More rare dolphins die in new spot along Brazil’s Amazon River -report
Reporterre : En Amazonie, une sécheresse interminable
Futura : La vie en Amazonie perturbée par une sécheresse extrême
The Guardian : ‘For us, the Amazon isn’t a cause, it’s our home’: the riverside communities stranded by the climate crisis
TF1 Info: Près de 60 degrés ressentis à Rio : les Brésiliens confrontés à une chaleur extrême
Article rédigé par Edwige Grunenwald et Quentin Moreau pour Planète Amazone