Femme activiste indigène, Marisol García Apagüeño a été élue en 2018 pour représenter la communauté Kichwa de Bajo Huallaga. Elle est la seule femme leader de la Fédération des peuples indigènes Kechua Chazuta Amazonas (FEPIKECHA).
Les ressources naturelles de l’Amazonie suscitent un grand intérêt. Dès la fin du XIXème siècle, la fièvre du caoutchouc fait rage sur l’ensemble des terres amazoniennes et les peuples indigènes sont victimes de massacres. Un siècle et demi plus tard, les activités illégales perdurent sur ces terres. Les descendants des peuples indigènes de cette époque se battent toujours contre les activités extractivistes ou illégales (trafic de bois, trafic de drogue, exploitation pétrolière…).
Un titre de propriété inexistant
Marisol García soulève plusieurs problèmes auxquels sont confrontées les communautés indigènes de Kichwa de Bajo Huallaga. Le principal est d’ordre foncier. Rappelons que le titre de propriété n’existe pas pour les peuples indigènes de cette région. Comme le mentionne Mongabay : « aucune des 14 communautés n’a de titre de propriété sur leurs terres et trois d’entre elles ne sont pas reconnues comme indigènes. » La revendication identitaire de ces Terres, héritées de leurs ancêtres, continue à rester lettre-morte. Et cela n’est pas un hasard. Luis Hallazi, avocat spécialiste de l’Institut pour le Bien Commun (IBC), explique qu’il existe un lien direct entre les activités illégales et l’absence de titre. Ce que Marisol García confirme : « sans titre de propriété, nous ne pouvons rien réclamer, car lorsque nous nous adressons au gouvernement régional, ils nous demandent des documents que nous n’avons pas.» Par conséquent, les peuples indigènes de cette région ne peuvent faire valoir leurs droits et sont contraints de se mettre en danger.
L’Amazonie péruvienne victime de sa richesse
Dans le portrait de Mongabay, Marisol García souligne également les problèmes liés aux activités illégales. Depuis plusieurs années, l’Amazonie est le nouvel Eldorado des trafiquants de drogue et des exploitants forestiers. Malgré les actions en justice, ces pratiques ne cessent de s’intensifier et menacent les populations indigènes de cette région. En août 2020, la région de Santa Rosillo déplorait 10 hectares de cultures illégales. Créatrice et directrice d’une radio locale (Voces de la Selva), la cheffe indigène relaie des informations en lien direct aux problèmes que rencontrent les communautés Kichwa de Bajo Huallaga. Mais dénoncer ces pratiques n’est pas sans danger. Marisol García explique avoir reçu des menaces.
“Ils peuvent tuer un, deux, trois d’entre nous, mais d’autres viendront défendre la forêt, ils ne nous extermineront pas.”
Ces dernières années, plusieurs défenseurs de l’environnement ont été torturés et assassinés par ces mafias. Un membre de la communauté de Santa Rosillo de Yanayacu, déclare : « Nous avons peur pour nos vies, car ils peuvent nous faire disparaître, nous savons déjà qu’ils nous surveillent et ils savent que nous avons dénoncé leurs actions illégales, mais les autorités ne nous écoutent pas. Que pouvons-nous faire d’autre? ». La détresse de ces communautés est palpable. Néanmoins, Marisol García ne se laisse pas intimider et clame « Ils peuvent tuer un, deux, trois d’entre nous, mais d’autres viendront défendre la forêt, ils ne nous extermineront pas.» Dans l’article publié par Mongabay, plusieurs personnes prennent position sur le sujet et alerte sur la nécessité de mettre en place des actions afin de protéger les Terres et la vie des défenseurs de la forêt.
Par ailleurs, la pandémie de COVID-19 n’a fait qu’accentuer les inégalités présentes sur le territoire péruvien. Les droits de l’Homme et de l’environnement sont indissociables, il est clair que ces communautés doivent disposer d’un titre de propriété afin d’empêcher davantage le développement de ces activités illégales sur leurs Terres. Le président de la Fédération Fepikecha, Wilger Apagüeño Cenepo, dit à ce sujet : « Il n’est pas possible qu’une entreprise ait de meilleures possibilités d’accès à la terre que nous qui prenons soin et préservons la forêt.»
Retrouvez l’interview du Président de FEPIKECHA, en espagnol.
© Source : Mongabay